La réalisation de la place Notre-Dame avec la construction de différents édifices date du 19ème siècle, à l’époque des grands travaux accomplis à Paris par le Baron HAUSSMANN (1809-1891) – Préfet de la Seine – à la demande de Napoléon III, l’empereur lui ayant confié la tâche d’embellir et assainir Paris en démolissant, construisant de larges avenues et de beaux immeubles dits de style haussmannien.
La famille LESPÉRUT, propriétaire du château d’Eurville, possède une fortune considérable (usines, fermes, terres, forêts). Elle est également une famille influente politiquement : maires, députés.
Le baron François-Auguste LESPÉRUT (1813 -1873) est un proche du Baron HAUSSMANN.
La place Notre-Dame spacieuse, avec des bâtiments construits symétriquement et une longue avenue rappelle ces grandes réalisations parisiennes, reprises par d’autres villes notamment à Alger, Bordeaux, Rouen à la même époque.
En 1850, l’abbé GUILLEMIN, récemment installé à la cure d’Eurville, en visite chez la baronne LESPÉRUT, regrette le très mauvais état de l’église.
Alors le baron député-maire se lance dans une grande entreprise : la construction d’une nouvelle église.
Pour quelles raisons ?
- volonté de faire plaisir à sa mère âgée,
- souci de montrer la grandeur d’Eurville et la sienne,
- laisser un bâtiment considérable qui témoignerait de son œuvre -la flèche culmine à 52 m-.
Le style néogothique s’inspire des monuments gothiques du 13ème siècle ; il s’impose au 19ème siècle symbolisant l’unité de la France.
Les LESPÉRUT, le curé et les habitants ont participé au financement.
L’église Notre-Dame en sa Nativité a été inaugurée le 10 octobre 1855. Elle a coûté 107 000 francs, la famille LESPÉRUT a donné 23 000, le curé 6 000, le reste a été financé par une souscription auprès des habitants.
En 1866 le baron François LESPÉRUT – maire, demande à l’architecte FISBACH de Saint-Dizier d’établir un projet important dont l’idée lui aurait été suggérée par le baron HAUSSMANN, lors d’une visite qu’il aurait effectuée à Eurville.
- une place publique avec un marché couvert et une avenue,
- une salle d’asile, deux écoles, garçons et filles,
- une mairie,
- une chapelle pour le cimetière.
En 1867 sera aménagé un square à la place de l’ancien cimetière qui entourait l’église.
En 1921, on construira le monument aux morts.
L’ancienne mairie-école de garçons construite en 1789 se trouvait à l’ancienne poste -rue de Monicault- la poste étant transférée depuis 2006 dans l’ancien presbytère.
La famille LESPÉRUT soucieuse de l’éducation des enfants de sa commune fait construire en 1848 une maison commune – l’actuelle mairie – avec deux salles de classe pour les garçons et deux logements d’instituteurs.
En 1869 seront construites une école de filles, une salle d’asile pour les jeunes enfants et un ouvroir pour les jeunes filles avec logement pour les sœurs institutrices.
En 1866, le baron LESPÉRUT donne 1 000 francs pour le nouveau presbytère qui coûtera 16 000 francs.
La commune reçoit des subventions de l’Etat et du Conseil Général, elle a recours à une imposition supplémentaire et effectue des emprunts pour réaliser tous ces travaux.
En même temps le baron fait don de terrains pour prolonger l’avenue des écoles jusqu’au cimetière «à condition que jamais, à aucune époque, on n’y laissera passer ni voitures, ni chevaux, ni bestiaux, ni autres animaux, mais seulement des piétons, sauf en cas d’absolue nécessité.»
Mairie et presbytère, sont de beaux bâtiments identiques, face à l’église, de part et d’autre de l’allée centrale qui conduit au Jard, au cimetière, avec en perspective la chapelle.
La construction de la chapelle prévue en 1869 sera réalisée en 1873. En effet la défaite de la France en 1870 suivie par l’Occupation allemande va entraîner des frais de paiement de l’indemnité de guerre aux Allemands et retarder le projet. Une partie de la chapelle sera édifiée avec des pierres provenant de l’ancienne église.
Les travaux qui vont être entrepris en 2017/2018 dans cet ensemble redonneront l’aspect originel du projet envisagé, il y a 150 ans par le baron HAUSSMANN «grand aménageur de Paris».
Jocelyne SABATES – MAIGRET
Documents : archives municipales, cartes postales.
Souvenirs et Monuments d’Eurville de Mgr FEVRE (1880)
Le siècle d’or du canton de Chevillon d’Hubert HUSSON (2007)