Longue de 13 km et d’une largeur de 8 km, la forêt du Val qui a donné son nom au château, est partagée entre les communes d’Eurville-Bienville, Humbécourt, Attancourt, Troisfontaines-la-Ville, Roches-sur-Marne, Saint-Dizier et Valcourt s’étend de Wassy à Saint-Dizier entre les vallées de la Blaise et de la Marne. De tout temps durent avoir lieu des chasses dans le Val, on n’a pas de renseignement sur la période antérieure au XVIème siècle.
Chasse à courre à l’époque des Guise
La forêt du Val est traversée par de longues et larges «tranches » ouvertes par les Guise. Les ducs de Guise, seigneurs de Joinville sont une puissante famille au XVIème siècle, proche du pouvoir royal. La forêt du Val fut alors le théâtre de brillantes chasses à courre organisées par cette famille. A la fin du siècle, elle disparut de la scène politique, c’en fut fini pour longtemps des chasses à courre dans le Val.
Avant 1885
Dans la seconde moitié du XIXème, M. Jules Marcellot, demeurant à Paris acquit une grande partie de la forêt du Val et fit construire vers 1870 le château du Val à proximité d’Humbécourt. Il organisait des battues et des chasses à tir dans cette forêt peuplée principalement de sangliers, de chevreuils, de lièvres. Il équipa un chenil (Chemin de l’Abbaye) sous la direction d’un piqueur, de deux gardes et d’une vingtaine de chiens.
Vers 1890
Monsieur Jacques Marcellot crée le Rallye du château Ganne
Chasse aux sangliers et aux chevreuils
Monsieur Jacques Marcellot (1861-1953) son fils, maître de forges à Eurville, chasseur confirmé prit la succession de son père pour la direction des chasses. Pendant plus de quarante ans, il allait en être l’infatigable animateur et le principal maître d’équipage.
De 1979 à 1939, il détaillait chaque journée de chasse dans des carnets.
Il constitua le Rallye du Château Ganne, du nom d’un lieu de rendez-vous situé au milieu de la forêt et s’associa au Marquis des Réaulx pour former un brillant *vautrait sous la conduite d’un piqueur.
*Un vautrait est un équipage important composé de chiens courants spécialisés dans la chasse au sanglier, au cerf et au chevreuil, animaux de vènerie.
Tenue d’équipage : gilet bleu, boutons avec inscription « Rallye d’Eurville » et culotte blanche.
Chasse aux cerfs
En 1903, le sanglier ayant pratiquement disparu, on chassa le chevreuil. Messieurs Marcellot et des Réaulx firent venir un couple de cerfs et trois ans plus tard, il y avait une belle harde en forêt du Val. Suite à des invitations, d’autres équipages se joignent au groupe et viennent régulièrement en forêt du Val :
- Equipage de M. de Souzy, de Gevrolles (Côte d’Or) qui chassait le cerf en Bourgogne et en forêt d’Arc, vint passer une douzaine de journées en 1906 au Val et revint régulièrement.
- Equipage de M. Viry, d’Allichamps, veneur infatigable autant que bon cavalier, suivait assidûment les chasses au Val.
Chaque équipage avait sa musique de sonnerie de trompes.
De tout temps, M. Marcellot convia de nombreux invités à suivre les chasses. Si l’on parcourt ses carnets on apprend qu’il recevait les officiers, du haras de Montier-en-Der de même que ceux des garnisons de la région : cavaliers en tunique et culotte rouge avant 1914, en bleu après 1918 puis en couleur kaki.
Entre 1908 et 1914, il y eut 30 chasses aux cerfs, 23 prises, dont 18 dans l’eau, étangs ou ruisseaux. Cachés dans les roseaux, abandonnés à la nuit tombée, sept animaux réussirent à s’enfuir. A l’automne 1914, la guerre sévit depuis plus de deux mois : plus n’est question de chasse au cerf.
1914-1918
Le gibier ne cessa d’augmenter ; le nombre de sangliers devint inquiétant pour l’agriculture. A défaut de chasses, il fallut procéder à des battues administratives que M. Marcellot fut chargé d’organiser. Y furent conviés les habitants des localités voisines ainsi que des militaires qui se trouvaient en cantonnement, des chasseurs expérimentés : 5 sangliers abattus en hiver 1915 et 16 l’hiver suivant.
1919 -1939
La guerre terminée, les chasses ne tardèrent pas à reprendre. Le Val se repeuplait de cerfs. Les chasses avaient lieu tous les samedis pendant la saison d’hiver et le jour de la Saint-Hubert, le rendez-vous était fixé aux Maisons Forestières.
M. Marcellot était chargé des fonctions de maître d’équipage accompagné de son piqueur M. Sussey, surnommé La Trace qui avait débuté chez M. Viry et de son fils Hubert (père de Jean-Pierre) faisant office de second (les piqueurs avaient toujours un surnom donné par le maître d’équipage : La Besogne, La Brisée, La Rosée, La Feuille. . . tous vieux noms de la vènerie française).
Il y avait en moyenne une trentaine de chasses par saison et une vingtaine de prises de cerfs.
Le piqueur (ou piqueux) valet à cheval joue un rôle essentiel dans la chasse à courre. Il élève, éduque et entraîne les chiens. Il prépare la chasse, repère le gibier et dirige la meute avec des valets à pied. Il sonne le cor pour annoncer l’hallali, au moment où la bête se rend et est mise à mort avec une dague par le maître d’équipage. C’est la curée, les chiens fatigués et affamés reçoivent les viscères.
Notes de M. Marcellot
« La guerre intervient.
Au fur et à mesure que les évènements se précipitent et que les restrictions commencent pour l’alimentation de la population, des chiens sont abattus. Les chasses à courre n’ont pas repris. »
La dernière mentionnée sur le registre est du 18 avril 1939 –six heures de chasse– dernier cerf servi par M. Marcellot – Honneurs à M. J.de Rousiers, son gendre.
Sources : archives municipales – Les Cahiers Haut-Marnais : Numéro paru en 1951
Jocelyne SABATES-MAIGRET – Adjointe